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Un laboratoire dédié à l’investigation numérique de terrain

TRACIP, spécialiste de l’investigation numérique, a développé plusieurs laboratoires mobiles afin de permettre aux forces de l’ordre de mener leurs investigations au plus près du terrain. Parmi ces laboratoires, le mobil’IT est un modèle exclusif permettant aux enquêteurs spécialisés en numérique de réaliser des analyses forensiques et de la récupération de données, en mode autonome, nomade et collaboratif.

L’enjeu de la mobilité pour l’enquête

Les enquêteurs sont confrontés à plusieurs enjeux dans le cadre de leurs investigations et notamment la nécessité d’accélérer leurs enquêtes. Raccourcir les délais et limiter les étapes et manipulations pour préserver la preuve numérique en raison notamment de sa « fragilité » est une préoccupation croissante. Les solutions qui permettent de déployer les moyens de traitement et d’analyse de la preuve au plus près de la scène d’intervention apportent une réponse à ces défis. Tracip (entité de Deveryware appartenant à Flandrin technologies, la division cyber du groupe ChapsVision), premier laboratoire français privé d’expertise judiciaire numérique a développé depuis 2014  le mobil’IT dédié à l’investigation numérique. Conçu pour accompagner les enquêteurs lors de leurs interventions, ce laboratoire est un véhicule comprenant toute l’installation nécessaire à la réalisation d’investigations numériques sur le terrain.

Proposer les mêmes qualités qu’un laboratoire fixe

Le mobil’IT, véhicule hautement équipé, a été pensé pour tirer le meilleur parti des équipements et optimiser les processus de travail, en situation d’itinérance. Il dispose des mêmes fonctionnalités qu’un laboratoire fixe, « traditionnel », tout en étant totalement autonome. Le Système d’Information y joue alors un rôle central : il est le centre névralgique qui permet aux équipes d’enquêteurs de réaliser leurs missions sans contrainte, et de rester connectés avec l’extérieur, que ce soit par des moyens de communication traditionnels (4G, satellite…) ou spécifiques (réseau privé chiffré). La distribution du réseau interne se fait de la même façon que pour tout autre laboratoire, qu’il soit cuivré ou fibré. En outre, il dispose de ses propres ressources en interne pour une autonomie complète, avec l’intégration de différents serveurs. La configuration permet également d’accéder au contenu de mémoires flash et de disques durs défectueux ou endommagés.

Alimentation électrique autonome, équipements spécifiques (baie informatique, stations de travail, salle blanche), dispositifs de communication, etc., la configuration offre souplesse et efficacité au service de la résolution des enquêtes.

Intérieur du mobil'IT - investigation numérique
Les équipements du mobil’IT permettent de mener des investigations numériques
en complète autonomie

Spécificité de la preuve numérique

Aujourd’hui, il est difficile pour un enquêteur de synthétiser de manière pertinente et rapide de grandes quantités d’informations. Les outils d’analyse et les méthodes évoluent, afin de traiter et d’exploiter des volumes de données toujours plus importants dans le but de mettre en relief rapidement les éléments les plus pertinents. Dans un monde de plus en plus numérisé, l’accès aux éléments de preuves impose de mettre en œuvre des techniques de recueil rigoureuses qui ne seront pas sujettes à contestation devant la justice.

L’investigation numérique permet de valoriser les indices en preuves numériques, afin d’en garantir l’admissibilité dans le cadre de l’enquête judiciaire. Aujourd’hui, l’émergence du cloud, l’augmentation de la diversité et du volume de données et des crimes dont la nature est devenue bien plus technique (faille de réseau…cybersécurité, etc.), pousse l’investigation numérique à évoluer. La fiabilité des résultats est une exigence à satisfaire, tout comme la vitesse de traitement surtout lorsque les échéances sont courtes. Par exemple, lorsqu’un suspect est en garde à vue, le temps de traitement est très limité. Et lorsqu’il s’agit d’une disparition, chaque minute compte.

L’enjeu pour l’investigation numérique est ainsi de favoriser la sauvegarde de la preuve et d’éviter l’altération, la falsification des données d’identification (auteur, horaire, matériel), pour prouver l’origine et l’intégrité du document numérique. Sans quoi il ne pourra pas être retenu par un juge.

La collecte, l’analyse et la restitution d’éléments de preuves issus de supports numériques dans une opération « terrain », imposent donc une vigilance accrue quant au traitement de la donnée.  Dans un contexte d’intervention en situation de mobilité, la preuve numérique est d’autant plus fragile, volatile, et complexe à localiser. Un défi auquel permet justement de répondre le mobil’IT.

Les laboratoires d’investigation mobiles, une expertise de TRACIP

TRACIP a développé une expertise unique en matière d’investigation numérique mobile : laboratoires déployables sur le terrain et kit d’investigation terrain (notamment le « Field k’IT backpack » conditionné dans un sac à dos et comprenant un hexib’IT laptop, un bloqueur externe et un duplicateur).

Concernant les laboratoires mobiles, TRACIP a développé conjointement avec l’IRCGN (L’Institut de recherche criminelle de la Gendarmerie nationale) le mobil’DNA, laboratoire mobile dédié à l’analyse ADN rapide pour l’identification humaine. Ce dispositif projetable est sans équivalent dans le monde pour opérer rapidement des analyses génétiques d’une grande quantité de prélèvements biologiques, pour l’identification de victimes multiples, qu’il s’agisse d’actes terroristes, d’accidents ou de catastrophes naturelles. En juillet 2022, le Centre de crise et de soutien du ministère de l’Europe et des affaires étrangères a fourni à la procurature générale d’Ukraine un mobil’DNA / Lab’ADN. Cette action s’inscrit dans le cadre du soutien de la France aux autorités ukrainiennes pour l’identification de leurs victimes suite à l’agression de la Russie.

L’analyse ADN express

Contrairement aux procédés habituels d’analyse ADN, deux heures suffisent au mobil’DNA pour obtenir les profils génétiques des 21 premiers échantillons d’analyse, incluant les étapes de mise en route et de calibration des équipements. Puis 21 nouveaux résultats d’analyse sont obtenus toutes les 30 minutes. Cette performance s’appuie sur l’innovation brevetée par l’IRCGN : le GendSAG (Gendarmerie Sample And Go), écouvillon de nouvelle génération, incluant un réacteur biologique supprimant l’étape d’extraction. Ses microfibres ont la propriété de collecter les traces biologiques avec une grande précision, minimisant ainsi leur altération et permettant de rendre l’ADN directement disponible pour une amplification par PCR et un génotypage par un séquenceur à électrophorèse capillaire.

Mobil'DNA laboratoire mobile génétique offert à l'Ukraine par la France - investigation numérique
Le mobil’DNA livré à l’Ukraine en juillet 2022 – Crédit : Jonathan Sarago – MEAE

Entièrement autonome en énergie, le mobil’DNA est capable d’analyser génétiquement jusqu’à 200 prélèvements biologiques par jour. Il embarque un cycle complet à bord, du prélèvement au résultat. De plus, les équipements d’analyse sont projetables si besoin par voie aérienne. Ce dispositif a été éprouvé à de multiples reprises, notamment lors de la tempête Alex (Alpes-Maritimes – 2020), de l’attentat de Nice (2016) ou du crash de l’avion de la German Wings (Alpes du Sud – 2015).

Utilisation de l'ADN dans le portrait-robot génétique

L’ADN à l’origine des portraits-robot !

Pour dessiner le portrait-robot d’un suspect, on avait coutume de faire appel à un portraitiste et à des logiciels spécialisés. Désormais, la police scientifique utilise aussi l’ADN récupérée sur la scène de crime pour dresser un profil physique très proche de la réalité.

En 1982, Edward Crabe, un australien de 57 ans, est assassiné dans sa chambre d’hôtel de Gold Coast situé dans l’état du Queensland. Malgré les nombreux témoignages recueillis et le prélèvement d’échantillons de sang sur la scène de crime, les enquêteurs ne réussissent pas à retrouver le coupable. 40 ans plus tard, la police australienne relance ce « cold case » en faisant appel au phénotypage de l’ADN. Cette technique encore récente, pratiquée notamment dans le laboratoire d’hématologie médico-légal de Bordeaux, permet de créer à partir de quelques cellules sanguines, le portrait-robot d’un suspect susceptible d’être identifié par les témoins ou l’entourage. 

Même inconnu, l’ADN parle !

C’est en tout cas ce qu’espèrent les policiers du Queensland qui ont lancé un nouvel appel à témoins le 9 novembre 2022. Ils comptent ainsi résoudre l’assassinat d’Edward Crabe grâce au portrait-robot établi à partir du sang retrouvé dans la chambre de la victime. Un premier profil ADN avait déjà été établi en 2020 mais celui-ci n’étant pas enregistré dans les bases de données nationales, les enquêteurs s’étaient rapidement retrouvés dans une impasse. Or, l’immense avantage du phénotypage, c’est que même lorsqu’un ADN n’est fiché nulle part, il n’en constitue pas moins une mine de renseignements sur la personne correspondante.

En quoi consiste cette technique ? On sait aujourd’hui que le matériel génétique renferme de très nombreuses informations, notamment sur le sexe, l’origine ethnique, la santé et l’apparence physique d’un individu. Les récentes techniques de séquençage de l’ADN permettent désormais d’analyser les séquences génétiques dites « codantes » et d’isoler celles qui renferment les indications morphologiques. Les scientifiques peuvent ainsi déterminer de façon suffisamment précise la forme d’un visage, la couleur de la peau, des yeux et des cheveux, une prédisposition à la calvitie ou encore la présence de taches de rousseur. A partir de ce profil génétique, il est possible d’établir un profil physique qui n’est à l’heure actuelle, ni complet, ni parfait mais qui peut permettre de réveiller les souvenirs de potentiels témoins.

Une technique qui tend à se perfectionner

Il existe aujourd’hui dans le Monde plusieurs équipes de chercheurs qui travaillent à perfectionner l’analyse de ces séquences génétiques liées au phénotype. L’objectif ?  Aller toujours plus loin dans la recherche des caractéristiques physiques des individus en prédisant par exemple la forme du lobe des oreilles ou encore l’âge de la personne étant à l’origine de la trace relevée.

Tous ces renseignements servent ensuite à mettre au point des programmes statistiques capables d’élaborer un portrait-robot génétique le plus proche possible de la réalité. Ces programmes, qui existent déjà aux États Unis, sont nourris par les entreprises proposant aux particuliers des tests ADN pour connaître leur généalogie et qui collaborent également avec les forces de l’ordre.

Dernièrement, une étude sur les sosies réalisée par une équipe de chercheurs du Leukaemia Research Institute à Barcelone (Espagne), est venue renforcer la réalité de ce portrait physique littéralement inscrit dans les gènes. En analysant l’ADN de ces « jumeaux virtuels », les scientifiques ont identifié des caractéristiques génétiques communes qui ne s’arrêtent d’ailleurs pas à  une apparence physique similaire. Elles sont également capables d’influencer certains comportements en matière d’alimentation et même d’éducation. Des résultats qui selon l’auteure principale de l’étude, Manel Esteller  «  auront des implications futures en médecine légale – reconstruire le visage du criminel à partir de l’ADN – et en diagnostic génétique – la photo du visage du patient  donnera déjà des indices sur le génome qu’il possède. Grâce à des efforts de collaboration, le défi ultime serait de prédire la structure du visage d’une personne à partir de son paysage multiomique .

Portraits-robot ADN génétique police scientifique aide dans la résolution des enquêtes judiciaires.
Exemple de portraits-robot génétique édités par Snapshot DNA analysis

Le projet européen VISAGE

L’objectif global du projet européen VISAGE (VISible Attributes Through GEnomics) est d’élargir l’utilisation judiciaire de l’ADN vers la construction de portraits-robot d’auteurs inconnus à partir de traces ADN le plus rapidement possible dans les cadres juridiques actuels et les lignes directrices éthiques.

Le consortium VISAGE est composé de 13 partenaires issus d’institutions universitaires, policières et judiciaires de 8 pays européens, et réunit des chercheurs en génétique légale et des praticiens en ADN judiciaire, des généticiens statistiques et des spécialistes en sciences sociales. Les objectifs sont :

  • d’établir de nouvelles connaissances scientifiques dans le domaine du phénotypage de l’ADN,
  • d’élaborer et valider de nouveaux outils dans l’analyse de l’ADN et l’interprétation statistique,
  • de valider et mettre en œuvre ces outils dans la pratique judiciaire,
  • d’étudier les dimensions éthiques, sociétales et réglementaires,
  • de diffuser largement les résultats et sensibiliser les différents protagonistes concernant la prédiction de l’apparence, de l’âge et de l’ascendance bio-géographique d’une personne à partir de traces d’ADN,
  • d’aider la justice à trouver des auteurs inconnus d’actes criminels au moyen du profilage de l’ADN

Pour aller plus loin :

https://snapshot.parabon-nanolabs.com/

Sources

https://www.newsendip.com/fr/comment-la-police-australienne-espere-resoudre-un-meurtre-de-1982-avec-un-nouveau-portrait-robot-issu-de-ladn-du-suspect/

https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/police/enquete-quand-ladn-dessine-des-portraits-robots_4882409.html

https://www.sciencedaily.com/releases/2022/08/220823115609.htm