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Utilisation de l'ADN dans le portrait-robot génétique

L’ADN à l’origine des portraits-robot !

Pour dessiner le portrait-robot d’un suspect, on avait coutume de faire appel à un portraitiste et à des logiciels spécialisés. Désormais, la police scientifique utilise aussi l’ADN récupérée sur la scène de crime pour dresser un profil physique très proche de la réalité.

En 1982, Edward Crabe, un australien de 57 ans, est assassiné dans sa chambre d’hôtel de Gold Coast situé dans l’état du Queensland. Malgré les nombreux témoignages recueillis et le prélèvement d’échantillons de sang sur la scène de crime, les enquêteurs ne réussissent pas à retrouver le coupable. 40 ans plus tard, la police australienne relance ce « cold case » en faisant appel au phénotypage de l’ADN. Cette technique encore récente, pratiquée notamment dans le laboratoire d’hématologie médico-légal de Bordeaux, permet de créer à partir de quelques cellules sanguines, le portrait-robot d’un suspect susceptible d’être identifié par les témoins ou l’entourage. 

Même inconnu, l’ADN parle !

C’est en tout cas ce qu’espèrent les policiers du Queensland qui ont lancé un nouvel appel à témoins le 9 novembre 2022. Ils comptent ainsi résoudre l’assassinat d’Edward Crabe grâce au portrait-robot établi à partir du sang retrouvé dans la chambre de la victime. Un premier profil ADN avait déjà été établi en 2020 mais celui-ci n’étant pas enregistré dans les bases de données nationales, les enquêteurs s’étaient rapidement retrouvés dans une impasse. Or, l’immense avantage du phénotypage, c’est que même lorsqu’un ADN n’est fiché nulle part, il n’en constitue pas moins une mine de renseignements sur la personne correspondante.

En quoi consiste cette technique ? On sait aujourd’hui que le matériel génétique renferme de très nombreuses informations, notamment sur le sexe, l’origine ethnique, la santé et l’apparence physique d’un individu. Les récentes techniques de séquençage de l’ADN permettent désormais d’analyser les séquences génétiques dites « codantes » et d’isoler celles qui renferment les indications morphologiques. Les scientifiques peuvent ainsi déterminer de façon suffisamment précise la forme d’un visage, la couleur de la peau, des yeux et des cheveux, une prédisposition à la calvitie ou encore la présence de taches de rousseur. A partir de ce profil génétique, il est possible d’établir un profil physique qui n’est à l’heure actuelle, ni complet, ni parfait mais qui peut permettre de réveiller les souvenirs de potentiels témoins.

Une technique qui tend à se perfectionner

Il existe aujourd’hui dans le Monde plusieurs équipes de chercheurs qui travaillent à perfectionner l’analyse de ces séquences génétiques liées au phénotype. L’objectif ?  Aller toujours plus loin dans la recherche des caractéristiques physiques des individus en prédisant par exemple la forme du lobe des oreilles ou encore l’âge de la personne étant à l’origine de la trace relevée.

Tous ces renseignements servent ensuite à mettre au point des programmes statistiques capables d’élaborer un portrait-robot génétique le plus proche possible de la réalité. Ces programmes, qui existent déjà aux États Unis, sont nourris par les entreprises proposant aux particuliers des tests ADN pour connaître leur généalogie et qui collaborent également avec les forces de l’ordre.

Dernièrement, une étude sur les sosies réalisée par une équipe de chercheurs du Leukaemia Research Institute à Barcelone (Espagne), est venue renforcer la réalité de ce portrait physique littéralement inscrit dans les gènes. En analysant l’ADN de ces « jumeaux virtuels », les scientifiques ont identifié des caractéristiques génétiques communes qui ne s’arrêtent d’ailleurs pas à  une apparence physique similaire. Elles sont également capables d’influencer certains comportements en matière d’alimentation et même d’éducation. Des résultats qui selon l’auteure principale de l’étude, Manel Esteller  «  auront des implications futures en médecine légale – reconstruire le visage du criminel à partir de l’ADN – et en diagnostic génétique – la photo du visage du patient  donnera déjà des indices sur le génome qu’il possède. Grâce à des efforts de collaboration, le défi ultime serait de prédire la structure du visage d’une personne à partir de son paysage multiomique .

Portraits-robot ADN génétique police scientifique aide dans la résolution des enquêtes judiciaires.
Exemple de portraits-robot génétique édités par Snapshot DNA analysis

Le projet européen VISAGE

L’objectif global du projet européen VISAGE (VISible Attributes Through GEnomics) est d’élargir l’utilisation judiciaire de l’ADN vers la construction de portraits-robot d’auteurs inconnus à partir de traces ADN le plus rapidement possible dans les cadres juridiques actuels et les lignes directrices éthiques.

Le consortium VISAGE est composé de 13 partenaires issus d’institutions universitaires, policières et judiciaires de 8 pays européens, et réunit des chercheurs en génétique légale et des praticiens en ADN judiciaire, des généticiens statistiques et des spécialistes en sciences sociales. Les objectifs sont :

  • d’établir de nouvelles connaissances scientifiques dans le domaine du phénotypage de l’ADN,
  • d’élaborer et valider de nouveaux outils dans l’analyse de l’ADN et l’interprétation statistique,
  • de valider et mettre en œuvre ces outils dans la pratique judiciaire,
  • d’étudier les dimensions éthiques, sociétales et réglementaires,
  • de diffuser largement les résultats et sensibiliser les différents protagonistes concernant la prédiction de l’apparence, de l’âge et de l’ascendance bio-géographique d’une personne à partir de traces d’ADN,
  • d’aider la justice à trouver des auteurs inconnus d’actes criminels au moyen du profilage de l’ADN

Pour aller plus loin :

https://snapshot.parabon-nanolabs.com/

Sources

https://www.newsendip.com/fr/comment-la-police-australienne-espere-resoudre-un-meurtre-de-1982-avec-un-nouveau-portrait-robot-issu-de-ladn-du-suspect/

https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/police/enquete-quand-ladn-dessine-des-portraits-robots_4882409.html

https://www.sciencedaily.com/releases/2022/08/220823115609.htm