L’expertise en résidus de tir – À la recherche de microparticules pour confondre un suspect

  • 21 mars 2022
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Lorsqu’un tir par arme à feu se produit, un nuage de résidus de tir va se former et s’échapper de l’arme par les différents orifices. Les particules produites, de l’ordre du millième de millimètre et de forme globulaire, vont se déposer sur les mains et les vêtements du tireur, mais également sur tout objet/personne présent aux alentours.

Prélèvement de résidus de tir

C’est à ce titre que l’expertise en résidus de tir trouve sa principale application, à savoir confondre un individu suspecté d’avoir tiré, voire d’avoir été présent à proximité du tir, et pour lequel on retrouve des particules pouvant être attribuées à des résidus de tir.

Analyse des résidus de tir par la Police scientifique - Forenseek
Photographies en microscopie électronique à fort grossissement de particules de résidus de tir. L’aspect globulaire est bien visible.

Ainsi lorsqu’un tireur présumé est appréhendé, des prélèvements sur sa personne sont effectués au moyen d’un kit, constitué de plusieurs tamponnoirs munis de faces collantes. Ces faces collantes vont être appliquées sur les mains et visage du suspect afin d’y récolter un maximum de particules microscopiques. Ses vêtements peuvent également être saisis pour être prélevés à leur tour, de même que des objets présents dans l’environnement des tirs (comme un véhicule utilisé pour la fuite par exemple).

Prélèvement par tamponnoir de résidus de tir sur la main d'un suspect - Analyse Police scientifique - Forenseek
Illustration d’un prélèvement effectué sur la main gauche d’un individu – Crédits : Forenseek

Analyse des résidus de tir

Les résidus de tir sont alors recherchés sur ces prélèvements à l’aide de puissants microscopes électroniques couplés à des microanalyseurs X, seuls instruments capables à la fois de visualiser des microparticules tout en permettant de déterminer leur composition chimique élémentaire. Cette recherche est fastidieuse car elle peut s’apparenter, toute proportion gardée, à la recherche de confettis éparpillés aléatoirement sur un terrain de football, mais dont l’herbe n’aurait plus été coupée depuis des semaines ! Ainsi le développement de cette technique de recherche et d’analyse n’a pu se faire qu’au prix d’une automatisation quasi complète du processus. La principale tâche du microscopiste consiste donc à contrôler les résultats obtenus afin de s’assurer de l’attribution correcte à la classe des résidus de tir des différentes particules identifiées par l’analyse automatique.

Analyse criminalistique d'un tamponnoir de résidus de tir par microscope électronique à balayage - Analyse Police scientifique - Forenseek
Analyse d’un tamponnoir à l’aide d’un microscope électronique à balayage couplé à une microanalyse X – Crédits : ThermoFisher scientific

L’interprétation des résultats

En routine, la recherche se focalise sur les particules riches à la fois en plomb, baryum et antimoine. La littérature scientifique rapporte en effet que les particules contenant simultanément ces trois éléments chimiques ne peuvent provenir que d’un incident de tir. Parfois, des références balistiques sont également analysées, pour mieux caractériser le type de particule à rechercher ; le cas idéal étant d’analyser les particules produites lors d’un tir de référence réalisé au laboratoire avec l’arme et les munitions litigieuses ; des prélèvements effectués sur les mains du tireur de référence sont alors analysés, pour établir les types de résidus de tir à rechercher sur les prélèvements relatifs au suspect.

Le rapport d’expertise reprendra le nombre de particules d’intérêt retrouvées sur les prélèvements ainsi qu’une interprétation de ces résultats en fonction du contexte et des conditions de prélèvements. En effet la persistance des résidus de tir est un problème rencontré fréquemment : ces particules sont stables dans le temps et ne vont pas s’évaporer, mais à l’instar de la farine sur les mains du boulanger, toute action que le tireur aura après le tir (comme se laver et s’essuyer les mains) aura pour effet de diminuer voire d’éliminer la présence de résidus de tir sur ses mains. Se pose alors la question d’analyser ses vêtements, pour lesquels la persistance des résidus de tir est généralement meilleure. A l’inverse, détecter qu’un individu est contaminé en résidus de tir n’implique pas nécessairement qu’il a tiré.

Des études ont en effet montré qu’une personne proche du tireur peut, dans certaines circonstances, être plus contaminée que le tireur lui-même ; une personne qui entre dans une pièce, dix minutes après où un tir est survenu peut également se faire contaminer par le nuage de poudre en déposition. Ainsi et de manière générale, l’interprétation des résultats devra tenir compte de ces éléments circonstanciels pour donner un avis éclairé sur la présence éventuelle et les quantités de résidus de tir sur les prélèvements relatifs à un suspect. Il reste que malgré les éventuelles difficultés d’interprétation, on arrive souvent à des résultats exploitables qui permettent d’aider le magistrat à progresser dans son dossier. A ce titre, une étude a récemment été réalisée en Belgique pour mesurer l’impact des expertises en résidus de tir sur les décisions judiciaires. Cette étude, en cours de finalisation, fera l’objet d’un prochain article.

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